DIGRESSION SUR LE QUARTIER DU PALAIS-ROYAL
L'écu, instructif, de la Ville de Paris au 163 Rue Saint-Honoré, situe : « ...dans l'enceinte de Charles V, la seconde Porte Saint-Honoré...».
Le HaIlé (6) nous confirme: « La Porte Saint-Honoré (deuxième du nom)... »
Cherchons donc la première.
Nous la trouverons, c'est logique, dans les, fortifications précédentes. C'est bien ce que nous dit Hillairet (7) à propos du :
« -145 Rue Saint-Honoré.
Le rempart de Philippe-Auguste coupait ici la Rue Saint-Honoré. La rue de l'Oratoire, voisine était son chemin de ronde intérieur et, là, s'éleva la première Porte Saint-Honoré, édifiée en 1190 et démolie de 1545 à 1548.
Elle fut avec les Portes Saint-Antoine, Saint-Denis et Saint-Jacques, l'une des quatre principales portes de Paris ...»
Il agrémente son ouvrage d'une plaisante gravure du XIIIème siècle la représentant et conservée à la Bibliothèque Nationale.
Ainsi les deux portes étaient-elles debout, au temps de Jeanne d'Arc.
L'emplacement de la porte de Philippe-Auguste aura, par la suite, une destination très variée. Devenu celui de l'hôtel du Bouchage, Jean Chatel y attentera à la vie d'Henri IV (1594).
Puis la Congrégation de l'Oratoire y construira, de 1621 à 1630, une église, que Napoléon 1er donnera en 1811 aux calvinistes (8). Cet édifice, de nos jours, est resté temple de l'Eglise Réformée.
Revenons-en à l'époque de Charles V. L'enceinte de Philippe Auguste se retrouvait donc intra-muros (9), nos deux portes étant distantes d'environ 450 mètres. D'elles deux, laquelle devint la Porte aux Aveugles, dénomination due à l'hospice fondé par Saint Louis et dont aucune d'entre elles n'était éloignée ?
La proximité pourrait faire pencher pour la plus récente: « Placée au passage de la chaussée Saint Honoré, (la porte) fut nommée à l'origine Porte des Aveugles, parce qu'elle touchait à l’hospice des Quinze-Vingt, qui soignait les personnes atteintes de cécité ...» (6)
Un plan, reconstituant le Paris de cette époque, la baptise quant à lui « Porte Saint Honoré », tandis qu'il indique sur l'enceinte de Philippe-Auguste. « Porte aux Aveugles, anciennement Porte Saint Honoré »(10).
Evitant l'affirmation péremptoire, j'attribuerais pourtant à la porte la plus ancienne cette référence aux usagers aveugles. En effet, à ma connaissance, aucun commentateur n'a traité de l'action de Jeanne contre Paris sous une autre formulation que celle de l'attaque de la « Porte Saint Honoré. »
En revanche, il n'y eût jamais qu'une Place du Théâtre Français à Paris.
Mais pas toujours au même endroit !
Ses mésaventures, à part son dernier accident, se rattachent à celles de son théâtre.
D'après Hillairet (7), le Roi Louis XV achète l'Hôtel de Condé et ses jardins en 1773. Il veut créer une place, destinée à recevoir un nouveau théâtre et aménager les rues avoisinantes pour en faciliter l'abord.
Louis XVI, s'il modifie l'emplacement du bâtiment, n'en poursuit pas moins l’œuvre commencée en 1774.
La salle est inaugurée le 9 Avril 1782 mais la place est ouverte à la circulation dès 1779 et s'appelle déjà Place du Théâtre Français.
Après diverses tribulations, l'établissement devient en 1797 l'Odéon (salle où l'on chante) parce qu'on y donne fréquemment des fêtes à l'antique.
A partir du 1er Octobre 1819, jusqu'à une époque assez récente où son nom est périodiquement torturé, cette salle conserve l'appellation de Théâtre de l'Odéon.
Avant de disparaître récemment des répertoires parisiens au profit d'André Malraux, la Place du Théâtre Français renaît au Palais-Royal. Sa forme moderne date de 1867.
Auparavant, sur l'emplacement d'un petit jardin privé, dit Jardin des Princes et réservé aux hôtes du Palais-Royal, l'architecte Victor Louis construisit un théâtre de 1786 à 1790. Il remplaçait celui qui était situé à l'extrémité orientale du Palais, détruit par un incendie en 1781.
L'ouverture du Théâtre Français se fit le 30 Mai 1799.
J. de La Ville-Baugé.
NOTES :
(6) Guy Le HaIlé: Les Fortifications de Paris (Horvath) Page 80
(7) Jacques HILLAIRET : Dictionnaire Historique des Rues de Paris -Editions de Minuit 1963
(8) Karl BAEDECKER -Le Manuel des Voyageurs -Paris et ses environs -Leipzig -1914
(9) dans ce secteur, le mur de Philippe-Auguste était sensiblement parallèle à l'actuelle Rue Jean Jacques Rousseau, recouvrant en partie la Bourse du Commerce cf: Pierre LA VEDAN : Nouvelle Histoire de Paris -Histoire de l'urbanisme de Paris -Page laI.
(10) Paris vers la fin du XIVème siècle. Plan restitué de Paris en 1380. LEURIDAN et MALLET -C.N.R.S -1975.
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