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Documentation
Les papes et Jeanne d'Arc |
Les deux textes qui suivent ont été écrits par le Père KRAEMER qui était le Directeur de la Confrérie Sainte Jeanne d’Arc et qui nous a laissé de nombreux textes pour enrichir notre réflexion et nos recherches sur Jeanne d’Arc. Nous gardons fidèlement son souvenir et saurons utiliser encore l’enseignement johannique qu’il nous a légué.
P.MAIRE.
LES PAPES ET JEANNE D’ARC
Le mystère de Jeanne d'Arc s'éclaire à la lumière de la Papauté. Benoît XV l'affirme : les papes anciens comme les papes récents ont aimé sainte Jeanne d'Arc. Leurs éloges sont « comme un bouquet des fleurs les plus magnifiques ».
A l'époque où eut lieu le navrant procès de Rouen, Jeanne en a appelé au pape. On s'est bien gardé de transmettre sa requête et pour cause... Le pape qui régnait alors à Rome ignorait tout de ce qui se passait à Rouen.
De Léon XIlI à Pie XI tous les papes ont reconnu les vertus chrétiennes et l'authentique sainteté de Jeanne d'Arc. C'est le désir d'imiter ses prédécesseurs qui a incité Benoît XV à hâter la canonisation de la Pucelle d'Orléans. Benoît XV était tout heureux de se nommer lui-même le « pape de Jeanne d'Arc ».
En retour, sainte Jeanne d'Arc, sous l'action de l'Esprit saint, porte tout droit son esprit, son cœur et sa foi vers le Successeur de saint Pierre. On a voulu la troubler en lui parlant de « l'Eglise militante ». Avec un discernement tout surnaturel elle en appelle au Pape, comme à Dieu lui-même : Elle déclare à ses juges: « Je m'en rapporte à Notre-Seigneur qui m'a envoyée et à Notre-Dame. Je m'en rapporte à Dieu et à notre Saint-Père le Pape. »
Ses Voix la guident vers la vérité et vers le seul gardien de la vérité, le successeur du premier pape à qui le Christ a dit: « Tu es pierre et sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise ». Son sens catholique fait déceler à Jeanne que ses juges ecclésiastiques ne sont pas cette « Eglise militante » qu'ils brandissent contre elle. Ses juges iniques participaient au concile schismatique de Bâle. Ils combattaient en même temps l'unité française ressuscitée par Jeanne au Sacre de Reims, et l'unité catholique dont le Vicaire de Jésus-Christ est le centre, la racine, le fondement.
Les papes ont vu en Jeanne d'Arc « le trait d'union entre la Patrie et la Religion, entre la France et l'Eglise, entre la terre et le ciel» (Benoît XV). C'est une des grandes leçons que nous donne sainte Jeanne d'Arc à notre époque où toutes les valeurs fondamentales sont contestées. Elle est bien le guide et le modèle de ceux qui respectent ces valeurs et veulent rendre au Roi du Ciel son domaine livré aux assauts de Satan.
C'est le pape Calixte III qui, sur la demande de la mère et des frères de Jeanne, institua des juges apostoliques pour la révision du procès de condamnation dont les auteurs participaient au concile schismatique de Bâle. Si l’Eglise a attendu un quart de siècle pour réhabiliter la Pucelle, c'est parce que l'évêque de Beauvais, Pierre Cauchon par son « Information posthume» et l'Université de Paris par sa lettre au Pape, ont pu surprendre la bonne foi du Saint-Siège. La réhabilitation de Jeanne d’Arc fut proclamée solennellement à Rouen la 7 Juillet 1456 par le Cardinal d’Estouteville, légat du pape. Cette proclamation ordonnait l'érection d'une croix expiatoire sur la place du Vieux-Marché. L'Eglise a mis cinq siècles pour canoniser Jeanne d'Arc. Diverses raisons, dont certaines politiques, expliquent ce long délai. Thomas More, décapité pour avoir refusé de reconnaître la souveraineté spirituelle du roi Henri VIII a attendu quatre siècles sa canonisation. C'est peu à peu, grâce aux recherches des savants, grâce aux minutieux examens des juges ecclésiastiques qu'une conviction s'est créée dans les esprits, celle du caractère surnaturel de la mission de Jeanne et celle de l'héroïcité de ses vertus.
C'est sous le pontificat de Pie IX et sur l'initiative de Mgr Dupanloup, évêque d'Orléans, qu'a été en quelque sorte « lancée » la cause de la canonisation de Jeanne d'Arc. La mise en route de cette cause ne fut pas facile, car à Rome, la sainteté de l'héroïne française, en étonnait plusieurs. Cette sainte à cheval, casquée, cuirassée, entraînant au combat des soldats, bouscu1ait certaines idées. C'est l'obstination du Cardinal Touchet qui triompha de tous les préjugés.
Le 27 janvier 1894 Léon X1II proclama Jeanne, « Vénérable ». « Dieu suscita Jeanne d'Arc, disait le Décret, pour relever les destinées de la patrie, pour revendiquer la Liberté et la Gloire de la Religion dont les intérêts étaient menacés. » «... La renommée de sa sainteté s'étant continuée sans interruption pendant quatre siècles, il est arrivé, enfin, qu'à notre époque, l'enquête ordinaire sur cette renommée de sainteté et de vertus a été faite dans la curie ecc1ésiastique d'Orléans... »
Le 6 janvier 1904, lors de la lecture du Décret d'héroïcité des vertus de la vénérable Jeanne d'Arc, saint Pie X déclarait : « Réjouissons-nous dans la cause de la vénérable Jeanne d'Arc, vierge qui, humble et simple enfant, née dans un obscur village, très fidèle aux observances de la vraie religion, se distingua par la pratique des vertus les plus hautes, vertus qui dépassaient son âge et sa condition, et cela jusqu'au sacrifice de sa vie, à tel point qu'elle est apparue comme un astre nouveau appelé à illustrer, non seulement la France, mais l'Eglise tout entière. »
La béatification de Jeanne d'Arc par Pie X restera dans les annales de la France catholique comme une grandiose manifestation de foi, de patriotisme, d'attachement au Souverain Pontife. C'est le dimanche 18 avril 1909 que nous fut donnée cette fête inoubliable à laquelle participaient soixante-dix évêques et quarante mille pèlerins. Le groupe orléanais avait apporté le drapeau tricolore qu'un de ses membres tenait déployé. Il eut l'heureuse idée de l'incliner au passage du Saint-Père qui en saisit à deux mains la soie et la baisa.
Le 16 mai 1920 Benoît XV déclara Jeanne d'Arc Sainte. Auparavant, 1ors de la lecture solennelle du Décret des miracles présentés pour la canonisation, il avait manifesté son admiration pour Jeanne d'Arc et sa prédilection pour la France.
«Nous avouerons qu'elle nous a plu, la fleur de la commémoration des magnifiques éloges que d'anciens Papes et des Papes récents ont décerné à Jeanne : les uns en s'étonnant que la cause de la béatification ne fût pas plus tôt introduite ; les autres, comme nos prédécesseurs immédiats, en se montrant disposés à faire tout ce qui était en leur pouvoir afin de hâter cette cause. Nous aimons ici à avouer que le désir d'imiter l'exemple de Pontifes si illustres redouble notre volonté de hâter à Jeanne d'Arc la couronne qui la proclamera Sainte. Mgr l'Evêque d'Orléans a dit que l'histoire nous appellera «le pape de Jeanne d'Arc ». Il est évident qu'il fait allusion à la canonisation de la Pucelle, il ne pouvait, en effet, oublier d'avoir célébré plus haut la mémoire de plusieurs autres Papes qui avaient bien mérité de Jeanne... Nous trouvons si juste que le souvenir de Jeanne d'Arc enflamme l'amour des Français pour leur Patrie, que nous regrettons de n'être Français que par le cœur ». Pie XI qui succéda à Benoît XV voulut distinguer sainte Jeanne d'Arc entre tous les saints et saintes de son pays par une faveur extraordinaire. Le 2 mars 1922, tout en confirmant la Vierge Marie comme première patronne de la France, il proclama Jeanne d'Arc sa patronne secondaire. Ainsi l'Eglise romaine, après un silence de quatre siècles, a-t-elle rendu à Jeanne un hommage particulièrement éclatant.
Il reste un dernier fleuron à attacher à la couronne de gloire de sainte Jeanne d'Arc : l’inscription au calendrier de l'Eglise universelle de la fête liturgique de cette sainte dont le rayonnement est manifestement universel. Une croisade avait été naguère lancée dans ce but. Elle, avait été annoncée officiellement à Montmartre par Son Excellence Mgr Rupp, animée à Rome par son Eminence le Cardinal Valerio Valéri. Elle n’a abouti. Et pourtant, saint Pie X disait déjà en 1904 : « Jeanne, la gloire non seulement de la France, mais de l’Eglise universelle ! ».
Frédéric Kraemer. |